Négociations préélectorales : l’absence de transmission d’une liste électorale provisoire est-elle déloyale ?
Dans le cadre des élections professionnelles, il est nécessaire d’inviter les organisations syndicales à négocier un protocole préélectoral. A cet égard, ne pas transmettre rapidement aux syndicats participant à la négociation la liste provisoire des électeurs constitue-t-il un manquement à votre obligation de loyauté ?
Protocole d’accord préélectoral et obligation de loyauté : quelles sont obligations légales ?
Lors de l’organisation des élections professionnelles, vous devez inviter les syndicats représentatifs à négocier un accord préalable détaillant le déroulement des élections.
Si ces derniers acceptent la négociation, sera alors signé un document appelé “le protocole préélectoral” ou “protocole d’accord préélectoral” (PAP).
Négocié entre vous et les syndicats en amont des élections, ce document fixe les règles et les modalités de celles-ci. Il définit, entre autres, la répartition des sièges entre les différentes catégories de personnel et la répartition du personnel dans les collèges électoraux.
Attention
L’invitation à négocier doit parvenir aux syndicats au plus tard 15 jours avant la date de la première réunion de négociation.
Le protocole d’accord préélectoral vise à garantir que les élections se déroulent de manière régulière et équitable.
Notez-le
Depuis le 8 juin 2024, de nouvelles mentions obligatoires doivent être comprises dans l’invitation à négocier le protocole. L’invitation doit désormais préciser au moins les éléments suivants :
- le nom et l’adresse de l’employeur et, le cas échéant, la désignation de l’établissement ;
- l’intitulé et l’identifiant de la convention collective de branche applicable ;
- le lieu, la date et l’heure de la première réunion de négociation.
La négociation de ce document est soumise à une obligation de loyauté. C’est-à-dire que vous devez agir de manière transparente et équitable envers les syndicats et autres parties prenantes.
A ce titre, vous devez notamment fournir aux syndicats les éléments nécessaires afin qu’ils puissent vérifier la régularité des listes électorales et contrôler les effectifs de l’entreprise.
Protocole d’accord préélectoral et obligation de loyauté : quel impact si vous remettez tardivement la liste électorale ?
C’est la question à laquelle a répondu la Cour de cassation le 14 novembre 2024.
Dans cette affaire, plusieurs syndicats reprochaient à l’entreprise :
- des irrégularités liées à l’exclusion de certains salariés des listes électorales ;
- et un défaut de loyauté dans les négociations préélectorales du fait d’une production tardive de la liste provisoire des électeurs.
Les syndicats ont demandé l’annulation des élections ainsi que la rectification des listes électorales. Ils ont été entendus par le tribunal judiciaire qui a estimé que la transmission tardive de cette liste avait rendu la négociation déloyale.
La Cour de cassation sanctionne la décision du tribunal judiciaire et rappelle qu’en vertu de son obligation de loyauté l’employeur doit fournir aux syndicats participant à la négociation les informations nécessaires au contrôle des effectifs de l’entreprise et de la régularité des listes électorales.
Toutefois, elle considère que la transmission d’une liste électorale provisoire n’est pas nécessaire pour permettre aux syndicats de contrôler les effectifs ou de négocier utilement le protocole préélectoral.
Aussi, la Haute juridiction a considéré que la remise tardive d’une telle liste ne suffisait pas à prouver une atteinte à la loyauté des négociations ni à justifier l’annulation des élections.
Cour de cassation, chambre sociale, 14 novembre 2024, n° 23-20.551 (la remise tardive d’une liste électorale provisoire ne suffit pas à prouver une atteinte à la loyauté des négociations ni à justifier l’annulation des élections)