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Toute disparité de traitement entre salariés doit être justifiée par des critères objectifs, matériellement vérifiables et étrangers à tout motif discriminatoire. Comment ce principe est-il retranscrit à la négociation collective et plus particulièrement en cas d’accord de substitution ?

Les différences de traitement opérées par accord collectif sont présumées justifiées

Pour rappel, les différences de traitement opérées par voie de conventions ou d’accords collectifs sont présumées justifiées.

Il s’agit des différences de traitement :

  • entre catégories professionnelles, opérées par voie de convention ou d’accord collectif ;
  • entre salariés exerçant, au sein d’une même catégorie professionnelle, des fonctions distinctes, opérées par voie de convention ou d’accord collectif ;
  • entre salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d’accord d’établissement ;
  • entre salariés appartenant à la même entreprise mais à des établissements distincts, opérées par voie d’accord d’entreprise ;
  • entre salariés appartenant à la même entreprise de nettoyage mais affectés à des sites ou des établissements distincts, opérées par voie d’accord collectif.

Pour renverser cette présomption, le salarié doit démontrer que les disparités sont étrangères à toute considération de nature professionnelle.

Pour autant, la Cour de cassation refuse de reconnaître une présomption générale de justification de toutes différences de traitement entre les salariés opérées par voie de conventions ou d’accords collectifs.

Quid de l’application de ce principe au cas de l’accord de substitution ?

Les différences de traitement opérées par accord de substitution sont présumées justifiées

Lorsque des contrats de travail sont transférés d’un employeur à un autre, il est courant de conclure des accords de substitution.

Les accords de substitution visent à régler et à unifier le sort des statuts collectifs en vigueur dans les entités concernées par l’opération.

Il s’agit d’accords de transition conclus pour une durée maximale de 3 ans, bénéficiant aux salariés dont les contrats de travail sont transférés à une nouvelle entité.

L’accord de substitution étant une forme particulière d’accord collectif venant adapter les accords existants, celui-ci génère très souvent des situations d’inégalités entre les salariés des entités absorbées et absorbantes.

La Cour de cassation a eu l’occasion de statuer sur une inégalité de traitement soulevée à l’occasion d’un accord de substitution.

Dans cette affaire, suite à une fusion-absorption d’une société par un autre, un accord de substitution prévoyait le maintien d’un avantage de prise en charge de frais de transport domicile/lieu de travail pour les seuls salariés de l’entreprise absorbée.

Un salarié, initialement embauché par la société absorbante, est muté sur l’établissement employant tous les anciens salariés de la société absorbée. Il réclamait, au regard du sacro-saint principe d’égalité de traitement, que lui soit appliqué l’accord de substitution susvisé, ce que lui refusa l’employeur.

Pour trancher ce litige, la Cour de cassation déroule le raisonnement suivant :

  • en premier lieu, il est acté que les différences de traitement entre des salariés appartenant à la même entreprise opérées par un accord de substitution, sont présumées justifiées ;
  • en second lieu, celui qui entend renverser cette présomption doit démontrer que ces différences de traitement sont étrangères à toute considération de nature professionnelle.

La cour d’appel a retenu que cette preuve était rapportée par le salarié et que la différence de traitement instaurée par cet accord de substitution était étrangère à toute considération de nature professionnelle car :

  • le dispositif concernait le coût des déplacements domicile-travail, lesquels sont exclus du champ du temps de travail effectif ;
  • le montant de l’avantage consenti variait selon le lieu de domicile choisi librement par le salarié et qu’elle reposait ainsi sur des caractéristiques personnelles du salarié, relevant de sa vie privée.

A tort pour la Cour de cassation qui censure cette décision au motif que la différence de traitement n’était pas étrangère à « toute considération de nature professionnelle ».

Une position qui semble venir sécuriser une typologie d’accord collectif aux termes desquels les signataires sont souvent amener à instaurer une différence de traitement entre les salariés des sociétés absorbés et absorbantes afin de gérer une période de transition, souvent délicate et, dont la seule issue réside dans les compromis qu’un accord de substitution peut prévoir.

Cour de cassation, chambre sociale, 5 février 2025 n° 22-24.000 (la différence de traitement résultant du maintien, par un accord de substitution, au profit des seuls anciens salariés du site de la société absorbée, de l’indemnisation de leurs frais de transport entre leur domicile et leur lieu de travail, n’était pas étrangère à toute considération de nature professionnelle)

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