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Une question récurrente lors de la construction ou de l’audit des BDESE concerne le traitement des salariés travaillant à l’étranger et des agents publics. Doit-on les intégrer dans les statistiques de la base ou peut-on les en exclure ? En l’absence de réponse claire dans les textes encadrant la BDESE, une analyse juridique s’impose.

Agents publics et salariés basés à l’étranger : les règles de décompte des effectifs

Pour déterminer la manière d’intégrer les agents publics travaillant dans l’entreprise ou les salariés amenés à travailler à l’étranger, il convient d’observer si ces travailleurs sont à prendre en compte dans l’effectif de l’entreprise.

Pour rappel, des règles particulières existent en matière de droit de la Sécurité sociale et de droit du travail.

Concernant le droit de la Sécurité sociale, le Bulletin officiel de la Sécurité sociale (BOSS) fournit des renseignements précieux dans le dossier « règles d’assujettissement » – « effectif ». L’effectif doit inclure les « salariés français expatriés, dès lors que leur affiliation au régime français de sécurité sociale n’est pas maintenue », ainsi que les personnes « titulaires de contrats de travail ou de conventions » affiliées à la Sécurité sociale française. Les agents publics détachés dans l’entreprise sont également comptabilisés. Par contre, les agents publics mis à disposition de l’entreprise ne sont pas pris en compte.

Concernant l’effectif « droit du travail », il faut aller chercher les apports de la jurisprudence. Plusieurs arrêts rendus par la chambre sociale de la Cour de cassation sont intéressants à ce titre :

  • les agents publics mis à disposition d’une entreprise privée sont électeurs et éligibles dans cette entreprise, sous les mêmes conditions que les salariés de l’entreprise (Cass, soc., 17 avril 2013, n° 12-21.581). Quant aux agents publics détachés, la logique d’assimilation aux droits des salariés de l’entreprise implique également qu’ils soient électeurs et éligibles au sein de leur entreprise d’accueil ;
  • les salariés rattachés contractuellement à un établissement français et exécutant leur contrat à l’étranger sont électeurs et éligibles au niveau de l’établissement français et doivent donc être intégrés dans l’effectif de cet établissement (Cass, soc., 4 mai 1994, n° 91-60.008) ;
  • les salariés travaillant dans des succursales ou filiales étrangères d’une société établie en France sont à intégrer dans l’effectif de la société française s’ils sont « contractuellement liés à celle-ci par un lien de subordination », caractérisé notamment par la possibilité pour la société de les réintégrer dans leurs fonctions initiales (Cass, soc., 18 juillet 2001, n° 00-60.231) ;
  • a contrario, les juges rappellent que « les personnels recrutés à l’étranger pour y exercer définitivement et exclusivement leur activité sont exclus de l’effectif et de l’électorat pour les élections » du CSE (Cass, soc., 5 décembre 2000, n° 99-60.318).

Les critères de rattachement à l’effectif sont donc parfois différents entre le droit de la Sécurité sociale et le droit du travail. Cette divergence provoque un débat lors du remplissage de la BDESE :

  • certaines données – concernant notamment les effectifs, la sécurité et les conditions de travail – doivent être renseignées sur la base de l’effectif défini par le Code du travail ;
  • tandis que les données relatives à la paie requièrent l’utilisation de l’effectif au sens du Code de la Sécurité sociale.

Attention : les salariés étrangers travaillant en France pour une société française doivent être pris en compte dans l’effectif droit du travail. Pour l’effectif droit de la Sécurité sociale, ces salariés sont également à prendre en compte car bien rattachés au régime de la Sécurité sociale française (sauf dans le cas d’un détachement par une structure étrangère, détachement ne conduisant pas à l’assujettissement à la Sécurité sociale française).

Agents publics et salariés basés à l’étranger : les choix propres à la constitution de la BDESE

Malheureusement, aucune jurisprudence ni texte de loi ne vient préciser comment prendre en compte les agents publics ou les salariés travaillant à l’étranger dans les statistiques de la BDESE.

Un accord de branche (dans les entreprises de moins de 300 salariés) ou un accord d’entreprise peut venir répondre à la question du traitement des agents publics ou des salariés travaillant à l’étranger. L’employeur est alors tenu de remplir la base en respectant les arbitrages de cet accord.

Faute d’accord, il appartient à l’employeur de déterminer lui-même le traitement à retenir pour ces travailleurs. Il existe toutefois un risque de contestation par les élus pour informations incomplètes, pouvant conduire à bloquer ou retarder une procédure de consultation et, dans certains cas, entraîner une sanction pour délit d’entrave au fonctionnement régulier de l’instance.

A notre sens, compte tenu du rôle de la BDESE, il semble difficile de ne pas tenir compte des travailleurs tels que les agents publics ou les salariés envoyés à l’étranger. Par contre, plusieurs méthodes de présentation des données sont envisageables.

Il est ainsi possible d’intégrer pleinement ces travailleurs dans les statistiques de l’entreprise, ou encore de réaliser des statistiques propres à ces travailleurs (notamment quand leur nombre est important au niveau de l’entreprise). On pourrait également envisager un traitement différent selon chaque donnée fournie dans la base.

Certaines entreprises ne traitent pas du cas de ces travailleurs en indiquant qu’ils font l’objet d’un traitement par des logiciels de paie, de gestion des temps différents ou par des gestionnaires RH dédiés. Cette pratique complexifie la remontée et le regroupement des données, et ces arguments ne sont pas recevables en cas de contentieux. Par contre, l’employeur peut légender la base en expliquant pourquoi certains travailleurs ne sont pas intégrés dans certaines données ou traités de manière séparée.

Le plus simple pour l’entreprise serait sûrement de créer une rubrique présentant une liste de données propres à ces populations, permettant ainsi aux élus d’être informés de leur situation et d’en suivre l’évolution. Cette rubrique pourrait, par exemple, inclure des informations sur la durée des mises à disposition des agents publics ou la rémunération perçue par les salariés travaillant à l’étranger. Une telle création nécessite toutefois, à notre sens, d’insérer une clause dédiée dans un accord d’entreprise négocié sur le contenu de la BDESE.

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