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Les relations collectives dans les entreprises ont été profondément impactées par les ordonnances dites « Macron » du 22 septembre 2017. Depuis, peu d’évolutions législatives sur le sujet. Mais un récent rapport parlementaire vient proposer des évolutions majeures. Analyse critique par Olivier Castell, expert en droit du travail et relations sociales, formateur et enseignant vacataire en droit du travail.

Rapport sur la simplification : des propositions parlementaires qui touchent au droit du travail

Le rapport de simplification, remis au ministère de l’Economie et au ministère du Travail par cinq parlementaires le 15 février 2024, comporte 14 propositions de réformes législatives ou réglementaires visant à simplifier la vie des entreprises.

Parmi ces propositions, nous allons nous attarder spécifiquement sur la proposition numéro 4 intitulée « Alléger les obligations des trois principaux seuils 11-50-250 en les translatant d’un niveau ».

Tout est dans le titre : l’idée est d’augmenter certains seuils d’effectifs, décalant en conséquence les obligations propres à chacun de ces seuils. Des exemples d’évolution sont donnés par le rapport.

Le rapport propose notamment de faire évoluer :

  • le seuil de 11 à 50 salariés pour l’obligation de mettre en place un CSE ;
  • le seuil de 50 à 250 salariés pour le passage au CSE « renforcé », disposant de la personnalité juridique et du droit aux consultations obligatoires.

Voilà un changement réellement majeur. Pour les entreprises comptant actuellement entre 50 et moins de 250 salariés, le CSE ne disposerait plus de subventions de fonctionnement et d’activités sociales et culturelles. Et son rôle se limiterait à porter les réclamations des salariés et à défendre les salariés en matière de santé, sécurité et conditions de travail.

Evidemment, le passage envisagé du seuil des 50 salariés à 250 salariés pour l’obligation de consultations obligatoires du CSE entraîne le changement du seuil de mise en place de la BDESE.

Rapport sur la simplification : les réformes proposées touchant à la BDESE

Ainsi, l’effectif déclenchant l’obligation de mettre en place la BDESE passerait à 250 salariés, selon la proposition 4 du rapport parlementaire du 15 février 2024. Cette proposition indique également que le seuil des 250 salariés existant actuellement pour le renforcement du contenu obligatoire supplétif de la base (correspondant à l’article R. 2312-9 du Code du travail) passerait à 1000 salariés.

Deux remarques s’imposent.

La première remarque est que le renforcement du contenu obligatoire supplétif de la BDESE est lié actuellement à un seuil de 300 salariés et non de 250 salariés. Une telle erreur dans ce rapport met le doute quant au travail d’analyse mené !

La seconde remarque est que de façon inexplicable, la proposition 1 du même rapport indique qu’il faudrait supprimer la BDESE « dont l’utilité réelle n’est pas avérée dans un contexte de renforcement des obligations de reporting extra-financier (CSRD prévue par le droit européen) ». On change les seuils ou on supprime ?
Pour rappel, ce reporting extra-financier a fait l’objet d’une très récente intégration dans le droit français. Il impose la réalisation d’un rapport de durabilité se substituant à la déclaration de performance extra-financière, avec un champ d’entreprises concernées en hausse.

Sauf cas de certaines petites entreprises cotées ou de succursales de sociétés non européennes, le rapport de durabilité devra être produit par les entreprises dépassant au moins deux des seuils suivants : 250 salariés, 25 millions au bilan, 50 millions de chiffre d’affaires net.

Avis d’expert :

En effet, avec l’intégration du rapport de durabilité dans le Code du commerce, davantage d’entreprises vont devoir communiquer dans leur rapport de gestion annuelle, communiqué aux actionnaires, des informations sur la durabilité. Informations qui pour certaines sont redondantes avec celles prévues dans les articles R. 2312-8 et R. 2312-9 du Code du travail. Mais le niveau de détail reste bien différent entre ce rapport de durabilité et la BDESE. Notamment au niveau social.

Supprimer la BDESE ou jouer sur les seuils m’apparaît comme une mesure sans réelle réflexion sur la portée dans les entreprises. La BDESE étant une création à l’origine des partenaires sociaux, sans lien avec le droit européen. Les informations contenues dans un rapport de gestion dédié aux actionnaires seront-elles suffisantes aux élus du CSE pour rendre un avis éclairé dans le cadre des consultations obligatoires menées par l’employeur ? Peu évident. Et si cela nécessite de communiquer des informations supplémentaires par papier à l’ouverture des consultations, la suppression de la BDESE perd de son intérêt.

Quelles pistes d’amélioration pour la BDESE ? Remplacer certains indicateurs par le dépôt de documents contenant les informations pourrait alléger le travail de remplissage des entreprises. Étant alors exigé que ces documents soient déposés dans des sous-rubriques précises de la base. Uniformiser les données entre les rubriques égalité et investissement social de la BDESE et l’index égalité professionnelle, mesure demandée par ailleurs par le rapport du 7 mars 2024 réalisé par le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes. Ou bien clarifier toutes les incertitudes demeurant notamment sur la fréquence des mises à jour et l’usage de la BDESE dans les relations avec les délégués syndicaux.

Il va être donc très intéressant de suivre si et comment seront retranscrites ces propositions dans de futurs textes législatifs et réglementaires. Ce rapport comprenant, par ailleurs, d’autres propositions intéressant le champ du droit du travail.

Rapport parlementaire du 15 février 2024 « Rendre des heures aux Français – 14 mesures pour simplifier la vie des entreprises »

 

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